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Pier Goodmann
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Au Maroc, pays des riches dans une ère parallèle, nous sommes tellement riches et fortunés que nous aspirons tout et ne laissons rien à nos pauvres ministres et hauts fonctionnaires. Le ministre se trouve obligé de clôturer son mois avec des crédits pour se nourrir. Il est si mal fichu qu’il emprunte à des banques détenues par le peuple. Nous sommes riches au point que ce même ministre se retrouve inconsciemment jaloux du simple citoyen.

Au pays des riches, le ministre et le haut responsable se trouvent en bas de l’échelle contre leur gré. Ils espèrent revenir à l’état du citoyen normal tant le peuple les a accablés de charges injustes. Ils arrivent à peine à se payer de quoi nourrir leurs familles, s’imposent et leur imposent des régimes alimentaires rudes face à des prix de matières premières, de légumes et d’autres qui ont pris l’habitude naturelle de flamber.

Par dégoût de leurs conditions de vie, ils trouvaient ce goût manqué dans le sucre jusqu’au jour où ils entendirent parler d’une éventuelle hausse de prix. Qui revendique sa mise en effet? Le peuple bien sûr. Obligeant qu’il est, ce peuple, ils se trouvent maintenant devant le fait accompli de lever la compensation sur une partie de ce produit.

Eux qui étaient habitués à acheter des petits grammes de sucre en poudre à 2 dirhams auront bientôt une autre charge de plus. En y pensant, ils convergent toutes et tous vers un argumentaire commun pour convaincre leurs familles de ne plus utiliser cette matière nuisible à la santé et au bien-être. Ils devront persuader leurs familles en faisant face à la même réplique partagée qui se répète depuis plusieurs années et dont ils ont vraiment assez: “Encore un durcissement dans le régime alimentaire?”

Et comment pourraient-ils répondre à leurs enfants qui, impactés par tous ces changements brusques et continus, leur demandent pourquoi ne démissionnent-ils pas de leurs postes de ministres ou hauts responsables pour enfin vivre dignement, dans un niveau de vie élevé comme le reste du peuple? Au fond d’eux, ils savent que c’est une décision difficile à affronter car ce qui les alimente n’est pas d’ordre pécuniaire mais plutôt ce sens de responsabilité et cet amour inconditionnel et interminable de leur pays qui les fait accrocher à leurs postes.

Au pays des riches, là où le peuple est financièrement aisé et abuse de son pouvoir pour mettre la pression sur les hauts responsables, ces derniers saignent dans une hémorragie infernale et périlleuse pour pouvoir éduquer leurs enfants. Ils ont pendant des décennies inscrit leurs enfants dans des écoles privées nulles, non par choix mais par contrainte. Comment faire pour les éduquer dans l’école publique que le peuple a détruite par son indifférence et son esprit matérialiste?

Pire encore, récemment, nos ministres et hauts fonctionnaires se sont réveillés au rythme d’une nouvelle qu’ils ne pouvaient jamais imaginer. Dans une matinée froide, ils ont entendu parler d’une nouvelle revendication dure du peuple. Les citoyens se préparent pour sortir revendiquer la mise en place de frais de scolarité dans des établissements publics.

Les pauvres ministres ne peuvent que souffrir devant cette injustice. Ils ont pleuré de peine pour leur situation ainsi que celle de leur pays, surtout qu’ils ne peuvent rien refuser à ce peuple qui a autant de pouvoir. Un pouvoir qui est acquis par l’argent que celui-là détient et accroît dans des conditions méconnues. Rien à faire, semble-t-il, pour un ministre pour contrer cette demande, puisque le peuple est hyper riche et est dans la capacité de payer ces frais d’éducation sans compatir avec la situation du haut responsable qui sombre de plus en plus dans la précarité.

Au pays des riches, le peuple contrôle la rente énergétique et pétrolière. Un jour, dans un élan de solidarité avec leurs concitoyens gérant les organismes de gestion déléguée d’eau et d’électricité, quelques citoyens ont boosté les prix. A leurs yeux, cette mesure ne pouvait gêner personne puisqu’ils savent très bien que le reste du peuple est juste richissime. Toutefois, ils ont encore une fois oublié la situation de ce ministre qui doit obliger à ses enfants à ne plus allumer plus d’une ampoule à la maison. A peine a-t-il commencé à s’habituer à ce nouveau mode de vie calamiteux qu’il s’est retrouvé un jour évanoui devant le panneau des prix de carburant. Eh oui! Le peuple a encore une fois abusé. Mais jusqu’à quand continuerait-il à le faire? Un tas de questions auxquelles les ministres et les hauts fonctionnaires de ce pays ne trouvent pas de réponses et ne les trouveront jamais.

Au pays des riches, le peuple crée de la valeur et ne cesse de produire tellement la demande extérieure est affluente d’un trimestre à l’autre. Ceci ne peut être qu’un plus pour le pays. Mais le peuple se sent de moins en moins compétitif dans certains marchés mondiaux à cause de la valeur d’un dirham qui accroît exponentiellement d’un jour à l’autre. Alors, que faire? Baisser cette valeur? Non, mais ce sont les hauts responsables qui devraient l’appliquer.

Toutefois, n’étant pas riches comme le peuple, ces hauts responsables n’ont forcément pas été bien éduqués. Il est donc judicieux de choisir une autre alternative qu’ils pourraient lancer sans souci de compréhension ou de besoin d’approbation. Se basant sur sa relation intime et esclavagiste avec un organisme dit FMI, le peuple décida d’imposer la libération de ce maudit dirham qui empêche l’apogée de ses exportations. Les hauts fonctionnaires devant une telle décision et détermination ne pouvait qu’appliquer en se taisant.

Au pays des riches, ce peuple riche abuse tant de son pouvoir qu’une certaine catégorie des hauts responsables et ministres est sortie manifester, pacifiquement, dans les rues. Cette minorité grandit et s’élargit dans tout le territoire. Cependant, le peuple est riche, bénéficie d’une impunité très solide et donc s’en fiche complètement. Au pays des riches, le peuple surprend chaque jour par des décisions insensées, insouciantes et inévitables.

Au pays des riches, le peuple fait tout pour appauvrir les hauts fonctionnaires d’Etat. Ministres et homologues en pouvoir de gouvernance sont en bas de l’échelle et ne réussissent pas à relever la tête devant l’autorité abusive du peuple.

Ils rêvent, contrairement à leurs homologues dans d’autres pays, de justice sociale et de dignité pour s’élever au rang du citoyen normal. Mais… Ils ne font que rêver car le peuple est au-dessus de tout.

Au pays des riches, au peuple le bonheur, et aux hauts fonctionnaires, la misère!

Cet article a été publié sur le HuffPost Maghreb: https://www.huffpostmaghreb.com/soulaimane-amri/au-pays-des-riches-au-peuple-le-bonheur-et-aux-hauts-fonctionnaires-la-misere_b_19036220.html

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